Portrait

Césaria Evora, la diva aux pieds nus

Septembre 2024

Photo prise boulevard du Général d’Armée Jean Simon dans le 13ème arrondissement de Paris. Artiste graffeur Raf Urban.

Si l’artiste Césaria Evora, devient une Diva mondiale à la cinquantaine, la merveilleuse interprète et femme de caractère qu’elle fût, su marquer de ses interprétations d’exceptions son patrimoine musical au-delà de son pays natal et de prédilection, le Cap Vert. De son riche répertoire, nombres d’entre-nous retenons le titre Sodad si bien exprimé par Césaria sur les rythmes de la coladeira une musique Capverdienne alignée en version dansée et accélérée sur celle nostalgique de la Morna à la puissance plus plaintive héritée du milieu du 19ème siècle, et inscrite depuis décembre 2009 sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Du créole Capverdien, Sodade, tient sa racine du mot portugais Saudade qui se traduit comme une « tristesse empreinte de nostalgie, quand une personne se sent dépossédée de son passé ». Se sentait-elle dépossédée de son passé ?

Ma fierté est d’avoir porté notre voix créole dans le monde ; d’avoir exporté les mornas, ce blues cap-verdien, et d’avoir fait danser sur les coladeras de mon « Petit Pays » C.E

Il est certes impossible de répondre en son nom, mais il est fort de constater comme elle garde dans ses engagements tout au long de sa carrière les traces de celui de sa mère cuisinière de riches patrons blancs et de son père joueur non pas de mandoline, mais de violon, violoncelle, guitare et de cavaquinho, petite guitare à 4 cordes. C’est d’ailleurs sous l’influence paternel que la jeune Césaria se met à fréquenter les plus grands musiciens du pays. En jeune femme très moderne, c’est à 16 ans qu’elle rencontre le marin Edouardo, guitariste entre 2 vagues, il l’initie un peu plus musicalement et l’encourage à se produire pour peu d’argent dans des lieux publiques de sa ville.

Chemin faisant, entre vents et marées, la jeune Césaria passe de l’adolescence à l’âge de 20 ans lorsqu’elle trouve sur son chemin, le musicien émérite Gregorio Goy Gonçalves, qui l’amène à se produire sur les ondes de la radio locale et d’acquérir ainsi une notoriété jusqu’aux îles voisines, et d’enregistrer 2 bandes éditées en albums aux Pays-Bas et au Portugal. Nous sommes en 1975 lorsque la République du Cap-Vert devient indépendante, les socialistes prennent la tête du pays et imposent un système politique uni partie. La répercussion sur les activités économiques est d’une conséquence immédiate sur le tourisme, les salles de spectacles, les bars, restaurants et autres lieux de loisirs ferment les uns après les autres. Dépressive, la chanteuse Césaria Evora met alors une pause à sa carrière, avant de la reprendre un peu plus tard, elle est alors maman de 2 enfants.

En 1987, sa rencontre avec un Français d’origine Capverdienne, directeur d’un label dédié aux musiques de son pays, va marquer un virage dans sa vie professionnelle. Avec lui, elle part à Paris pour l’enregistrement d’un album, La Diva Aux Pieds Nus, qui malheureusement ne rencontre pas le succès attendu, malgré les concerts parisiens.

Son obstiné producteur, José da Silva insiste et l’entraîne sur de nouveaux projets plus ou moins prédominants, jusqu’à celui d’un nouvel album en 1992, Miss Perfumado, qui puise sa source sur les rythmes de La Morna des plus belles chansons de l’interprète Césaria Evora. Le succès est là, avec plus de 300 000 exemplaires vendus. Les tournées des festivals et concerts s’enchaînent. Grâce à sa personnalité et à son don du chant aux intonations particulières Césaria a combattu ses vieux démons d’alcool. Décorée de la Légion d’Honneur, et malgré une attaque cérébrale, c’est à l’automne 2009 qu’elle sort Nha Sentimento de l’auteur Manuel de Novas, malheureusement décédé peu après.

Malgré sa volonté et sa force de caractère, Cesária Évora se voit contrainte d’annuler sa tournée de septembre 2011. Peu après elle est hospitalisée chez elle à Mindelo sur son île natale où elle est née le 27 août 1941 et décédée à 70 ans le 17 décembre 2011 de problèmes cardiaques et respiratoires.

Surnommée la « Reine de la Morna », Césaria Evora nous laisse en héritage son souvenir de chanteuse aux pieds nus, un riche répertoire incontournable, ses actions engagées et entre autres, Mãe Carinhosa son premier album posthume paru 2 ans après son décès. Intégralement composé d’inédits de 1997 à 2005.

Sources : livres et internet.

Nous vous recommandons

Le documentaire

 « Cesária Évora, la diva aux pieds nus » : un portrait intimiste et émouvant

de la réalisatrice portugaise Ana Sofia Fonseca.

Un film sorti le mercredi 29 novembre 2023

 

Marie-Michaël Manquat/katjopine éko